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Toulouse-Lautrec au Grand Palais - le 27/10/2019 • 17:10 par APU



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H de Touluse-Lautrec - Panneau de la baraque de La Goulue à la Foire du Trône - La danse mauresque - 1895 © RMN Musée d'Orsay.
 



« Toulouse-Lautrec, résolument moderne »
au Grand Palais

 


Après la grande monographie qui lui avait été consacrée en 1992 au Grand Palais, on  retrouve Henri de Toulouse-Lautrec dans les Galeries nationales, avec quelque 200 œuvres illustrant ses talents tant de peintre que de dessinateur, d’affichiste que d’illustrateur. C’est peu quand on sait qu’il a laissé à sa mort 737 peintures, 275 aquarelles, 369 lithographies et plus de 5.000 dessins mais la sélection et la rareté de certaines œuvres valent un déplacement.
 


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           H. de Toulouse-Lautrec - La grosse Maria - 1894 - © Von der Heydt Museum               -           Le Cirque Fernando, écuyère - 1888 - © Art Insitute Chicago.


Certaines de ses huiles ont malheureusement disparu et l’affichiste de génie continue à faire un peu d’ombre au peintre… C’est bien regrettable car il devient très difficile de pouvoir regarder ses plus célèbres tableaux, partis à l’étranger pour la plupart. Le musée d’Albi qui lui est dédié (le très beau Palais de la Berbie) a fait un grand effort en prêtant ses œuvres phares, comme le Cabinet des Estampes de la Bibliothèque Nationale de France (qui a reçu en legs de la mère de l’artiste 371 lithographies, suivies par le fonds de son ami d’enfance galeriste et exécuteur testamentaire Maurice Joyant). Le Musée d’Orsay a participé avec de belles œuvres : «  Femme se coiffant »,  « Femme au boa », « Rousse à sa toilette », « La clownesse Cha-U-Koo », « Seule », « Le lit », etc. Le Musée des Arts décoratifs et celui des Beaux Arts de Paris ont été aussi mis à contribution.
 


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     H de Toulouse-Lautrec Femme rousse à sa toilette - 1896 - © Musée d'Orsay                                            H de Toulouse-Lautrec - Portrait de Van Gogh pastel - 1887 - © Van Gogh Museum.
 


Il faut aller admirer des œuvres très rarement visibles en France comme son portrait à la craie de Vincent Van Gogh prêté par le musée éponyme d’Amsterdam et d’autres venues de musées allemands (« La grosse Maria »,…), de Budapest. (« Ces dames au réfectoire »), de Madrid ou Copenhague (« Monsieur Delaporte au Jardin de Paris »). Clou de l’exposition, le portrait d’Yvette Guilbert chantant  « Linger, Longer, Loo » a été prêté par le Musée Pouchkine de Moscou et le Museu de Arte de Sao Paulo s’est défait de plusieurs chefs d’œuvres dont le fameux « Paul Viaud en tenue d’amiral du XVIIIe siècle » et un intérieur du salon du « Divan ».
 


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H de Toulouse-Lautrec - Portrait d'Yvette Guilbert chantant "Linger, Longer, Loo" - 1894 - © Musée Pouchkine Moscou - Archives Alinari Florance - Dist RMN
 


Contribution exceptionnelle des musées américains de New-York,  Pittsburg, Philadelphia  et des J. Paul Getty Museum et County Museum of Art de Los Angeles. Merci à la National Gallery of Art de Washington pour ces deux portraits magnifiques : la flamboyante rousse Carmen Gaudin (un de ses modèles préférés car il aimait les femmes qui ont « la tête en or ») et la serveuse Jeanne Wenz. Merci à The Art Institute de Chicago pour le prêt de trois œuvres majeures : « Au Moulin Rouge », «Au bal du Moulin de la Galette » et « Au cirque Fernando, l’Ecuyère »* (toile exceptionnelle qui avait été présentée à Bruxelles au « Salon des XX » en 1888.)
 


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H de Toulouse-Lautrec - La Blanchisseuse (Carmen Gaudin) - 1889 - © Collection particulière.
 


FAIRE VRAI ET NON PAS IDÉAL
 


Le choix de mettre en avant son côté « résolument moderne » est très pertinent (bien que les encadrements du XIXe siècle retenus soient très fatigués et peu en adéquation avec les œuvres). Élève de Fernand Cormon (avec Vincent Van Gogh), admirateur éperdu de son voisin dans le 9e arrondissement** Edgard Degas (qui l’intimidait) (suivre ce lien) et de Manet***, celui qui écrivait en 1883 « Vive la Révolution ! Vive Manet ! » a vite fait le choix d’un naturalisme expressif, « un résumé  d’existence physiologique et sociale ».
Lautrec voulait à dix-sept ans  « faire vrai et non pas idéal » quitte à déplaire. Comme il le fit en 1894 avec une affiche superbe mais trop caricaturale refusée par
Yvette Guilbert pour son spectacle aux Ambassadeurs : « Pour l’amour du ciel, ne me faites pas si atrocement laide ! Un peu moins ! ». Lautrec a fait partie du clan des « impressionnistes du petit boulevard » avec son ami Van Gogh (suivre ce lien). Son talent influencera Egon Schiele et Pablo Picasso (périodes bleue et rose).  


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H. de Toulouse-Lautrec - Femme tirant son bas - 1894 - © RMN Musée d'Orsay.
 

Beaucoup de ses huiles ne traitent que l’essentiel du sujet, laissant le fond et des parties volontairement inachevées afin de mieux faire ressortir le sujet et le mouvement qui l’intéressent. Il nous fait participer à la vie des cabarets, des bistrots et des bordels de Montmartre en mettant en avant le potentiel poétique de ce Paris canaille. Il nous ouvre les maisons closes côté filles avec leur fatigue, leur côté désabusé, leur laisser-aller au repas ou à la toilette.
Chez lui, les sujets ne sont jamais ni idéalisés ni stigmatisés. Son style incisif  et caustique est toujours  respectueux de la réalité. C’est sa modernité.
Lautrec aime cerner et épurer (sous l’influence des maîtres japonais), cadrer de façon audacieuse (comme Degas), adopter des angles de vision jamais encore expérimentés, faire éclater des couleurs fortes. Pour son ami le critique d’art Félix Fénéon, il « fout dans la turne un trafalgar de couleur et de rigolade » (…),  qui annonce le fauvisme.
 


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H de Toulouse-Lautrec - Panneau de la baraque de La Goulue à la Foire du Trône  - 1895 © RMN Musée d'Orsay.
 


Ah ! les gants noirs d’Yvette Guilbert et les jambes de Jane Avril dansant un chahut (qui deviendra le cancan)…  Émouvant ce portrait en pied de « tapir le scélérat » quittant la Comédie Française, le dégingandé Gabriel Tapié de Céleyran, ce cousin tant aimé amateur de voitures et compagnon permanent de plaisanteries potaches… Émouvants les deux grands panneaux (huiles sur toile) qu’il peignit en 1895 pour habiller la baraque de son amie La Goulue (en fin de carrière) à la Foire du Trône, toiles délavées, découpées, remontées, bien marquées par les intempéries, qui font partie des collections d’Orsay.  
 


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H. de Toulouse-Lautrec - L'anglaise du Star au Havre - 1895 - © RMN Musée d'Orsay.
 


Des salles sont consacrées à son talent d’illustrateur. Lautrec était l’ami de la plupart des écrivains de son temps même si Zola, Huysmans ou Edmond de Goncourt ne l’appréciaient pas. Thadée Natanson et son épouse Misia Godebska (suivre ce lien), égérie des Nabis, le font travailler à « La revue blanche » (1 rue Laffitte). J’ai aimé le dessin réalisé pour un double programme du Théâtre de l’Œuvre (1896), où il représente les deux auteurs, Oscar Wilde pour « Salomé » (interdit de représentation à Londres) à côté de Romain Coolus pour « Raphaël ». Lautrec était apprécié des critiques d’art de son temps et il n’avait rien d’un artiste maudit. Plusieurs livres élogieux lui seront consacrés par ses contemporains après sa mort.

Des photographies d’époque, où il se met souvent en scène avec humour, accompagnent toute l’exposition. Lautrec profitera de cette « technique » naissante pour peaufiner son art de traduire le mouvement. Personnage très attachant, il ne se départira jamais ni de son humour ni de sa bienveillance. Une place importante a été donnée aux photographies du spectacle inédit de la danseuse américaine Loïe Fuller aux Folies Bergère (joué en novembre 1892), avec des effets de voiles tourbillonnants colorés par des projecteurs. Lautrec en réalisera de belles lithographies stylisées.

Il faut découvrir tout cela. Vous avez le temps. L’exposition, qui a ouvert ses portes le 9 octobre, ne les refermera que le 27 janvier 2020

Anick PUYÔOU
 

Plus d'information encore sur Toulouse-Lautrec en suivant ce lien.

* Le cirque Fernando s’était installé en 1873 sur un terrain vague à l’angle de la rue des Martyrs et du boulevard de Rochechouart. Il deviendra le cirque Medrano en 1897 puis le Cirque de Montmartre en 1973, avant de laisser place à l’immeuble « Le Bouglione » (décoré depuis peu de fresques représentant des dessins d’enfants évoquant le cirque réalisés dans les écoles locales).

** Ses adresses successives à Montmartre : l9 bis rue Fontaine, 27 rue Caulaincourt, 19 rue Fontaine, 21 rue Fontaine, 27 rue Caulaincourt, 5 avenue Frochot. Entre 8 et 10 ans, Henri a fréquenté le lycée Fontanes (futur lycée Condorcet).
À noter : dans le catalogue (bilingue) de l’exposition une biographie de Stéphane Guégan fait désormais autorité (lieux et dates).

*** En mars 1890  Henri de Toulouse-Lautrec a participé à la souscription qui visait d’acheter « Olympia » pour faire entrer l’œuvre de Manet dans les collections nationales.

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GRAND PALAIS GALERIES NATIONALES

3 avenue Général Eisenhower
75008 Paris

Ouvert tous les jours sauf le mardi de 10h à 20h
mercredi, vendredi & samedi de 10h à 22 h

du 9/10/2019 au 27/01/2020

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