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Georges-Eugène Haussmann

© E. Fouquet 2015 © 9e Histoire 2016

GEORGES-EUGÈNE HAUSSMANN ET SON EMPREINTE DANS LE 9e

Georges-Eugène Haussmann garde souvent encore par ses grands travaux cette image de celui qui « mis bas les vieilles murailles et les nids à souvenirs des parisiens ». Ce n’est pas un enfant de notre arrondissement, puisqu’il est né le 27 mars 1809 dans un petit hôtel entre cour et jardin du Faubourg du Roule (au carrefour de l’actuel boulevard Haussmann et du faubourg Saint-Honoré), et mort le 11 janvier 1891 dans une maison de la rue Boissy d’Anglas, 

Comment d’ailleurs ne pas remarquer, ironie de l’histoire, que ces mêmes lieux appartenant  tous deux à l’actuel 8e arrondissement ont  été à leur tour détruits, le premier par Haussmann lui-même pour percer le boulevard qui allait porter son nom, le deuxième pour agrandir l’hôtel Crillon à l’orée du XXe siècle!

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Mais le 9e ne lui a pas été étranger, ses obsèques se sont d’ailleurs déroulées à l’église évangélique luthérienne de la rue Chauchat dont il était familier. D’ascendance alsacienne protestante, il avait même offert le grand crucifix et son christ en ivoire qui orne encore l’autel (représentation d’ailleurs non habituelle dans le culte protestant).

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Les premières années d’un jeune parisien

Dès son adolescence, le jeune Haussmann allait fréquenter ce qui est aujourd’hui le 9e arrondissement, en tant que brillant élève du lycée  Bourbon, nom de l’actuel lycée Condorcet, entre 1815 et 1848. Il côtoie là un jeune homme qui n’est autre qu’Alfred de Musset, mais également le jeune duc de Chartres, futur duc d’Orléans dont le père sera le roi Louis-Philippe, ce qui aura l’avantage ensuite de favoriser sa carrière administrative commencée dans le Sud-Ouest. 

Il fait partie également à cette époque d’un orchestre d’élèves en tant que violoniste et entre comme auditeur libre en classe de contrepoint et de fugue au Conservatoire dirigé par l’austère Cherubini. Il y fréquente alors Berlioz qui déjà en jeune romantique, et au grand dam du futur préfet de la Seine, bouscule l’harmonie classique ! Haussmann défend lui plutôt la construction symétrique des symphonies ou des cantates, la symétrie déjà…

A 21 ans, jusqu’alors non engagé politiquement, il se décide à participer à la révolution de 1830 en aidant son père opposé à Charles X et en collaborant au journal Le Temps d’inspiration libérale, dont les bureaux sont rue de Richelieu. Georges-Eugène fait alors office de messager et reçoit même une blessure le 29 juillet, pendant les Trois Glorieuses, ce qui ne l’empêche pas d’aller faire son rapport au banquier Laffitte et de faire la liaison avec la butte Montmartre où s’était établie la résistance aux troupes royales. Cela lui vaut de recevoir la croix spéciale de Juillet et d’assister, en compagnie de son ancien condisciple le duc de Chartres, à l’intronisation de Louis-Philippe.

L’ascension d’un serviteur de l’état au fort caractère

Le jeune homme va donc, avec ce soutien de poids, pouvoir débuter sa carrière, d’abord comme sous-préfet dans diverses villes de province durant la Monarchie de Juillet. Faisant déjà preuve d’une attitude politique opportuniste, il va passer ensuite dans le camp bonapartiste se souvenant sans doute que tout jeune il avait crié « Vive l’Empereur » en croisant Napoléon Ier !

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Soutenir Louis-Napoléon, le prince président, avant même que celui-ci devienne à son tour empereur le 2 décembre 1852, devient alors la logique des choses, ce qui va aider incontestablement Haussmann à devenir préfet de la Seine l’année suivante à 44 ans.

Les deux hommes vont alors entretenir une relation étroite et complémentaire pendant près de dix-sept ans (de 1853 à 1870). C’est cette longue durée de collaboration et cette rare continuité d’exercice qui va contribuer à largement transformer Paris.

La carrière du préfet, sorte de ministre de Paris sans en avoir le titre, se confond pratiquement en effet avec celle de l’empereur Napoléon III à la tête de l’état, à tel point que Thiers qualifia ironiquement Haussmann de « vice-empereur » !

On peut d’ailleurs rappeler ici les conditions dans lesquelles Georges-Eugène Haussmann a connu cette promotion. En décembre 1851 il a été choisi par Morny et les instigateurs du coup d’état qui va donner au prince-président tous les pouvoirs, pour l’imposer à Bordeaux, ville de réputation royaliste. Préfet de cette ville, il avait déjà commencé à « se faire la main » et ses aptitudes d’urbaniste se révélèrent dès lors aux autorités. Il s’était ainsi attelé à un projet de rénovation urbaine qui prévoyait la construction d’un boulevard circulaire et de quartiers neufs en jetant de nouveaux ponts sur la Garonne, qui seront d’ailleurs mis en chantier beaucoup plus tard.

En octobre 1852, Louis-Napoléon termine une tournée en province par Bordeaux où le préfet fait en sorte (avec l’aide déjà d’Alphand, futur bras droit d’Haussmann à Paris) que l’accueil qui lui est fait soit triomphal. Celui qui va devenir Napoléon III quelques mois plus tard, s’en souviendra et nommera le 22 juin 1853 Haussmann préfet de la Seine, en remplacement de Berger, jugé trop timoré. Il apprend cette nouvelle avec surprise (simulée ?) comme il le dit dans ses Mémoires : « La dépêche que je venais de recevoir me causait plus que de l’étonnement : un grand trouble de l’esprit. Rien ne m’avait fait pressentir ma nomination  au poste, absolument exceptionnel, dont il s’agissait… ». 

C’est Persigny, fidèle de Louis-Napoléon et alors ministre de l’intérieur, qui est le véritable instigateur de cette nomination en procédant de la façon suivante : Il invite tour à tour à dîner les préfets des principaux départements en les faisant parler pour juger de leur personne. Haussmann est convié le cinquième.

Voici le portrait  tracé par Persigny dans ses Mémoires, qui donne un bon aperçu du caractère fort de l’individu : « Chose étrange, c’est peut-être moins les facultés de son intelligence remarquable que les défauts de son caractère qui me séduisirent […]. J’avais devant moi un des types les plus extraordinaires de notre temps. Grand, fort, vigoureux, énergique en même temps que fin, rusé, d’un esprit fertile en ressources […] Avec une complaisance visible pour sa personne, il m’exposait les hauts faits de sa carrière administrative, ne me faisant grâce de rien. Pour lutter, me disais-je, contre des gens rusés, sceptiques, peu scrupuleux, voici l’homme tout trouvé […] Là où le gentilhomme de l’esprit le plus élevé, le plus habile, du caractère le plus haut, le plus noble, échouerait infailliblement, ce vigoureux athlète à l’échine robuste, à l’encolure grossière, plein d’audace et d’habileté, capable d’opposer les expédients aux expédients, les embûches aux embûches, réussira certainement ».

Il est d’ailleurs curieux de confronter ces propos à la version d’Haussmann figurant dans ses Mémoires: « M. de Persigny ne me connaissait pas personnellement, mais par l’exactitude, la précision, la liberté de ma correspondance, j’acquis de Bordeaux toute sa sympathie. Frappé des résultats auxquels j’étais parvenu, il me tenait en très haute estime ». Et il ajoute encore plus modestement « Je ne dois rien à personne si ce n’est à l’empereur et à mon propre mérite »…

Cette allure conquérante est également remarquée, mais aussi critiquée par Émile Ollivier, l’auteur de la disgrâce du préfet en 1870. Cela va cependant  permettre  à « l’Attila de l’expropriation » comme il fut parfois surnommé, de mener à bien des transformations qui n’ont pas d’équivalent à ce jour.

Cadre administratif, juridique et financier

Il convient d’abord de s’arrêter brièvement sur les moyens utilisés par le préfet pour parvenir à effectuer ces travaux considérables, y compris dans notre arrondissement.

Le baron Haussmann (titre utilisé à partir de 1857 en toute légalité à la suite de sa nomination en tant que sénateur et aussi en souvenir de son grand père maternel,  baron d’empire) va, on le sait, avoir largement recours au système de l’emprunt, source d’endettement.

Le préfet va surtout adopter la théorie prônée par Persigny : les « dépenses productives ». Elle consiste  à exploiter la plus-value des terrains expropriés puis revendus et les gains rapportés par l’investissement immobilier correspondant. Ce système peut ainsi être profitable aussi bien aux investisseurs publics que privés et doit permettre théoriquement de financer de nouveaux travaux.

Sur le plan de l’organisation administrative et financière, c’est le système des concessions à des entreprises privées qui est beaucoup pratiqué, mais ce système sera souvent remplacé sous Haussmann par celui de la régie où la Ville prend tout en charge pour des raisons le plus souvent de rapidité (cela sera aussi l’origine des critiques sur la gestion financière du préfet et sur ses « comptes fantastiques »)

Dans ses Mémoires, Haussmann a classé les opérations d’urbanisme entreprises selon « trois réseaux », terme qui sera conservé pour désigner ses travaux. Cela ne désigne pas des ensembles topographiques ni des ensembles hiérarchisés selon des priorités mais correspond plutôt à des classements selon les modes de financement adoptés (avec cependant aussi une certaine part de chronologie dans la réalisation des travaux).

Ainsi, le premier réseau correspond essentiellement à toutes les opérations entamées avant l’arrivée du préfet et terminées sous son mandat, le deuxième réseau correspond à des opérations financées au tiers par l’état (l’ambitieux traité des 180 millions, dont le montant sera largement dépassé) et le troisième et dernier réseau (après l’annexion des communes périphériques) financé par la Ville seule grâce à des emprunts qui seront d’ailleurs sources de controverses. C’est avec ce réseau que seront réalisés très souvent les travaux concernant le 9e

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A. Yvon - Napoléon III remet au baron Haussmann le décret d’annexion à Paris des communes suburbaines

 Sur le plan juridique, les règles d’urbanisme se limitaient auparavant essentiellement au principe de l’alignement, mis en place dès le milieu du XVIIIe siècle mais assez peu efficace dans les faits et souvent long dans son application car dépendant largement du bon vouloir du propriétaire.

L’important décret du 26 mars 1852 pris en matière d’expropriation va permettre de raccourcir très sensiblement les délais de démarrage des travaux, la collectivité pouvant procéder à de larges acquisitions de sa propre initiative pour des raisons d’utilité publique. Ce décret va ouvrir la possibilité à la Ville de profiter des plus-values que ses travaux de voierie et d’aménagement vont apporter aux terrains concernés avec la construction rapide d’immeubles générant eux-mêmes une rentabilité dans le cadre de lotissements. Ceux-ci voient en effet le jour à la suite des ouvertures de voies et dans les limites des terrains expropriés.

Les lotissements sont alors nombreux dans le 9e, même si dès la fin du XVIIIe ils sont déjà très présents dans l’ouest de l’arrondissement. Ils permettent d’ailleurs également « l’embourgeoisement » de celui-ci…

Sur le plan architectural, le décret du 27 juillet 1859 va établir les règles de l’urbanisme haussmannien que l’on connait encore aujourd’hui et que certains ont critiqué pour la trop grande uniformité résultant du respect d’une proportion entre largeur des voies et hauteur des immeubles.

Ainsi pour les rues anciennes d’une largeur inférieure à 7,80 m, l’immeuble ne doit pas dépasser 11,70 m de haut, pour les rues de 9,74 m (!), 14,60 m. En revanche pour les voies plus larges, la hauteur autorisée est de 17,55 m. Cependant pour les nombreuses nouvelles rues larges d’au moins 20 m, la hauteur des bâtiments peut atteindre 20 m, sans toutefois dépasser cinq étages au dessus du rez-de-chaussée, entresol compris. Autre caractéristique très haussmannienne, le profil des combles sur les façades côté rue ne peut dépasser une pente de 45 degrés. Les façades des immeubles construits sous Haussmann sont également très ordonnancées mais n’obéissent pas en réalité à une réglementation imposée. Ainsi on observe la plupart du temps des balcons filants au premier étage (l’étage noble au dessus de l’entresol) et souvent au cinquième, mais il s’agit plus là de principes volontairement appliqués par l’ensemble des architectes de cette époque.

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Façade Hausmannienne

Les objectifs généraux des travaux

Il ne faut pas oublier que c’est à Napoléon III que revient la responsabilité du schéma directeur des transformations. Il montre en effet à Haussmann dès sa nomination, comme celui-ci le dit dans ses Mémoires, une carte de Paris, le fameux « plan colorié » dont l’original a disparu dans l’incendie de l’Hôtel de Ville en 1871, où il avait tracé lui-même en bleu, rouge, jaune, vert, les différentes voies, couleurs correspondant au degré d’urgence et notamment la « Grande Croisée » permettant de pénétrer rapidement au centre de Paris.

Si son exil à Londres l’influence dans son souci d’ouvrir de nombreux espaces verts, Louis-Napoléon en arrivant en septembre 1848 gare du Nord a en effet un certain nombre d’idées maîtresses qu’on peut énumérer ici et qui trouveront aussi leur application dans le 9e.

Les visées stratégiques que doivent permettre les grandes percées en acheminant rapidement des troupes, ont certes été mises souvent en avant, mais l’établissement de bonnes liaisons entre les gares et entre celles-ci et le centre ville sont aussi importantes, les gares - ou les « embarcadères » comme on les a d’abord appelées - devant être les véritables portes de la ville en lieu et place des anciennes barrières.

Faciliter la communication entre les différents ministères et les sièges des grandes administrations est ensuite une autre priorité ainsi que le dégagement des monuments pour mieux les mettre en valeur. La création de places doit y contribuer (ce sera le cas par exemple de l’actuelle place d’Estienne d’Orves se trouvant devant l’église de la Trinité, construite elle-même dans l’axe de la rue de la Chaussée d’Antin).

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Plan des grands travaux d'Haussmann

Par ailleurs les travaux ont aussi une autre utilité pour Napoléon III : améliorer la vie de la population et réduire les risques de révolte. Haussmann reprendra cette thèse car, selon lui, l’éventrement des vieux quartiers insalubres doit contribuer en quelque sorte à l’assainissement spirituel des classes populaires (mais aussi plus concrètement à refouler les ouvriers du centre vers l’extérieur). Il citera fièrement dans ses Mémoires les propos que lui adresse l’archevêque de Paris de l’époque : « Vous combattez indirectement mais sûrement la misère morale en relevant les conditions d’existence des classes laborieuses. On ne se comporte pas dans des rues larges et droites, inondées de clarté, avec le même laisser-aller que dans des rues étroites, tortueuses et obscures ».

De plus, dans ce même souci d’amélioration, le préfet de la Seine va revoir complètement avec Belgrand l’approvisionnement en eau de la capitale, fusionner le réseau de la fourniture de gaz en créant la Compagnie du Gaz ou en unifiant les compagnies d’omnibus avec la Compagnie Générale des Omnibus (c’est d’ailleurs lui qui crée le système du ticket permettant une correspondance !).

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Les grands travaux dans le 9e

Ce fameux plan de Napoléon III qui consiste déjà à achever ce qui n’a été qu’esquissé auparavant, Haussmann va donc l’utiliser en le complétant considérablement dans le 2e arrondissement de l’époque, qui va devenir l’actuel 9e en 1860, avec le rattachement des communes périphériques.

Contrairement à la partie centrale de Paris qui est bouleversée et parfois largement évidée autour de grands édifices comme dans l’île de la Cité, notre arrondissement a plutôt gagné en densité avec, autour des quelques grandes percées que nous allons évoquer, la création de voies secondaires permettant alentour des lotissements.

C’est le cas par exemple dans le quartier de la rue des Martyrs avec les rues Milton, Choron ou Hippolyte-Lebas. Cela s’inscrit dans une histoire débutée à partir de 1770 dans le quartier de la Chaussée d’Antin, continuée dans le quartier Saint-Georges au début du XIXe et, sous le second empire, avec les lotissements comme la cité Fénelon, la cité Pigalle ou encore le secteur Gérando/Dunkerque.

Des opérations d’abord envisagées n’ont cependant jamais été exécutées, comme cette vaste place rectangulaire qui se serait située au carrefour de la rue La Fayette et de la rue Cadet, rayonnant d’une part  vers la future place de République (ancienne place du Château-d ‘Eau) et d’autre part vers la place André Malraux (près de la Comédie-Française). Haussmann n’en a jamais donné les raisons.

On peut noter aussi que les voies «historiques » traversant l’arrondissement du nord au sud (rues du Faubourg-Montmartre et du Faubourg-Poissonnière) n’ont pas été touchées par ces travaux.

La rue La Fayette

Une opération illustre bien les préoccupations à la fois stratégiques et fonctionnelles de Louis-Napoléon et d’Haussmann réunis : c’est la prolongation de la rue La Fayette (par tronçons successifs pour des raisons essentiellement de financement). Outre que c’est une des plus longues rues de Paris, cette ambitieuse et rectiligne percée radiale (mais limitée à 20 m de large) permet en effet de relier l’est de Paris au centre et même à l’ouest ensuite par sa liaison avec le boulevard Haussmann.

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La rue La Fayette et le débouché de la rue de Châteaudun

Le court premier tronçon, de la rue du Faubourg-Poissonnière à la place Franz Liszt, a d’abord été créé sous Charles X par ordonnance royale de 1822, en prenant son nom, (avec à proximité immédiate la caserne de la Nouvelle France) permettant d’ailleurs de créer le lotissement de l’enclos Saint-Lazare. L’objectif de prolongation en ligne droite de la voie, confirmé dès l’arrivée d’Haussmann, ne se traduit qu’en 1859 pour le tronçon reliant le secteur Faubourg-Poissonnière au Faubourg-Montmartre, et en 1862 pour le secteur Faubourg-Montmartre à la Chaussée -d’Antin, en débouchant alors derrière la place où va ensuite être édifié l’Opéra de Garnier...

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À signaler qu’Alphand, directeur des « Promenades et plantations » (et « véritable préfet de la Seine » selon Haussmann, compte tenu des importantes responsabilités qui lui étaient confiées!), créera par une concession le long de cette nouvelle rue, un de ces nombreux squares caractéristiques de cette époque, le square Montholon (1862), du nom de la famille du controversé général qui accompagna Napoléon à Sainte-Hélène, Charles-Tristan de Montholon et qui partagea la captivité du futur Napoléon III à Ham en 1840. Si le projet initial le dotait d’une fontaine monumentale, le square a conservé aujourd’hui ses grilles en fonte, et ses platanes.

 Le square Montholon au XIXe

À la percée principale de la rue La Fayette s’ajoutent alors, comme dans de nombreuses autres opérations, des voies secondaires permettant la construction de lotissements pour les classes bourgeoises, comme dans le cas présent les actuelles rues Mayran et Pierre Sémard encadrant le square. Cette dernière rue ouverte en 1865 passe d’ailleurs en viaduc sous la rue de Bellefond, plus ancienne.

Non loin, rue Rochechouart, Louis-Napoléon, auteur en son temps de « L’extinction du paupérisme » et avant l’arrivée d’Haussmann peu favorable à ces initiatives, avait fait construire en 1849 un immeuble original avec des espaces extérieurs de circulation, véritable phalanstère ouvrier : la cité Napoléon (toujours visible aujourd’hui). 

La liaison avec les gares

L’empereur a pour priorité de relier les gares, or le 9e se situe justement à l’intersection de grandes gares, certes extérieures à l’arrondissement. Ainsi la rue de Maubeuge est créée en 1861 mais d’une façon non rectiligne (chose rare chez Haussmann), « qui complète, avec la rue La Fayette prolongée, les abords de l’embarcadère du Nord » en descendant du boulevard de la Chapelle au quartier Notre-Dame-de-Lorette. L’opération de désenclavement de la gare du Nord entraîne d’ailleurs de vives discussions avec Hittorf, architecte de la gare avec qui Haussmann ne s’entendait pas… 

Dans le même esprit, la rue de Châteaudun ouverte en 1857 depuis la rue La Fayette jusqu’à la place de la Trinité, permet de relier la gare du Nord à la gare Saint-Lazare en dégageant l’église Notre-Dame-De-Lorette (avec la création également de la rue Laffitte qui a l’avantage de montrer l’alignement de cette église avec le Sacré-Cœur).  

Le percement de la rue de Châteaudun (d’abord rue du cardinal Fesch) va cependant détruire la maison de la rue Chantereine (disparue aussi) qu’a occupée, à proximité, Joséphine de Beauharnais, future femme de Bonaparte. Il s’agissait pourtant de la famille Beauharnais qu’avait fréquentée à l’époque le grand-père d’Haussmann, mais qu’importe !

La rue Saint-Lazare, élargie à 20 m à partir de la place de la Trinité, complète le dispositif pour se rendre à la gare Saint-Lazare (anciennement « embarcadère Saint-Germain ») avec son bâtiment de droite desservant les lignes de Normandie et de gauche à destination d’Auteuil et Versailles. 

Le nouveau quartier Opéra

Ce secteur a déjà fait l’objet d’études d’amélioration des communications et Haussmann va concrétiser le projet initié en 1852 : la rue de Rouen, future rue Auber, prolongeant la rue du Havre et permettant l’accès de la  gare Saint-Lazare aux boulevards. A son arrivée comme préfet, Haussmann a l’idée de faire de ce quartier une sorte de nœud d’échanges entre les différentes gares et de créer un nouveau centre d’animation aux confins des boulevards (ce qui explique aussi les opérations décrites précédemment).


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Cela passe aussi malheureusement par des expropriations qui permettront l’achèvement (tardif cependant) du dernier tronçon du boulevard Haussmann et provoqueront la destruction de beaux hôtels qui jouxtaient la Chaussée d’Antin comme celui d’Osmond ou celui de Guimard construit par Ledoux…

Les frères Péreire vont  alors acheter des terrains pour construire en 1862 dans le triangle Auber/Scribe/Capucines un ensemble d’immeubles résidentiels, dont le Grand Hôtel de la Paix dû à Armand, avec ses 800 chambres.

En 1865, boulevard Haussmann, ouvre le magasin du Printemps (trente ans donc avant celui des Galeries Lafayette). Haussmann complète l’aménagement du secteur en créant ce curieux losange formé entre les rues Auber, Halevy, Meyerbeer/Glück et Scribe, qui reste vacant d’ailleurs pendant quelques années avant que l’Opéra conçu par Charles Garnier ne voit le jour en 1875, complété par la place créée dans l’alignement de la future avenue de l’Opéra, issue du projet de l’avenue Napoléon menant au Louvre. Mais cela est encore une autre histoire… 

En conclusion, au-delà des fameux « comptes fantastiques » et de l’image de destructeur souvent liée au baron Haussmann,  on peut reprendre cette citation d’Adolphe Chérioux parue dans le Bulletin Municipal de 1929 : « Qui aujourd’hui nie la justesse des vues d’Haussmann, qui ose déclarer que son œuvre ne fut pas celle d’un grand administrateur ayant eu une vue admirable de l’avenir et ayant préparé, organisé le développement de Paris ? ». Cela garde sans doute une certaine actualité.

Emmanuel FOUQUET

Sources bibliographiques:- Mémoires du baron Haussmann, réédition 2000, Le Seuil  - Du vieux Paris au Paris moderne, André Morizet, 1932, Hachette - Paris-Haussmann, Jean Des Cars et Pierre Pinon, 1991, Arsenal/Picard - Haussmann, Michel Carmona, 2000, Fayard - Atlas du Paris haussmannien, Pierre Pinon, 2002, Parigramme.

© E. Fouquet 2015 © 9e Histoire 2016


Date de création : 24/05/2016 • 09:00
Catégorie : - Articles-Architecture
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