Chopin & George Sand
© D. Chagnas 2009 ©9e Histoire 2009 - 2014
CA S'EST PASSE DANS LE 9e
FRÉDÉRIC CHOPIN & GEORGE SAND
Les premières rencontres ont lieu rue Laffitte. Rue Pigalle puis square d’Orléans, les deux amants font appartements séparés. Ils reçoivent le Tout-Paris romantique de tous les arts et des Lettres
Rue Laffitte.
Dans les derniers mois de 1836, Chopin fait la connaissance de George Sand à l’Hôtel de France, 21 -23 rue Laffitte (aujourd’hui disparu) dans le salon de Marie d’Agoult qui y réside avec Liszt. Depuis octobre 1836, George Sand habite avec ses enfants ce même hôtel, « une auberge » écrit-elle, et fait salon commun avec son amie. Marie d’Agoult reçoit les célébrités romantiques du moment : écrivains, artistes, musiciens « et quelques hommes du monde intelligents. »
« Son salon improvisé dans une auberge était donc une réunion d’élite qu’elle présidait avec une grâce exquise (…) On faisait là d’admirable musique, et, dans l’intervalle, on pouvait s’instruire en écoutant causer. " George Sand, Histoire de ma vie.
Le soir même de cette rencontre, Chopin confie à son ami le musicien Ferdinand Hiller : « Quelle femme antipathique que cette Sand! Mais est-ce vraiment bien une femme ? Je serais tenté d'en douter »
Chopin et Sand se revoient plusieurs fois en 1837 et en 1838. « La grande question de l'amour est donc encore soulevée en moi ... » écrit alors George Sand au Comte Grzimala, l’ami intime de Chopin
Chopin veut bien se laisser séduire : « Et ses yeux dans mes yeux, yeux sombres, yeux singuliers. Que disaient-ils ? Elle s’appuyait sur le piano et ses regards embrasants m’inondaient. Mon amour avait trouvé son port. Liszt m’ayant vu solitaire la conduisit près de moi. Des fleurs autour de nous; mon cœur était pris Je l’ai revu deux fois depuis, dans son salon, entourée de la haute aristocratie française, puis une fois seule.» Chopin, Journal, 1837
« Elle m’aime. Aurora quel nom charmant !» Chopin, Journal, 1838
Eugène Delacroix (1798 -1863) : Frédéric Chopin, © Musée du Louvre, Paris.
Fragment du double portrait de Frédéric Chopin et de George Sand, 1838
16 rue Pigalle
En 1839, après le voyage à Majorque et un été passé à Nohant, George Sand loue rue Pigalle au n° 16 (aujourd’hui le n°20) deux pavillons au fond du jardin (ils n’existent plus). Chopin qui habite 5 rue Tronchet vient chaque jour y donner des cours de piano. Puis, en 1841 il décide d’habiter rue Pigalle le pavillon de Maurice Sand, le fils de George Sand. George habite l’autre pavillon avec sa fille Solange.
Balzac à Evelyne Hanska (1841) :« Elle demeure rue Pigalle, n° 16 au fond d’un jardin, au dessus des remises et des écuries d’une maison qui est sur la rue (…) Son petit salon est couleur café au lait et le salon où elle reçoit plein de vases chinois superbes pleins de fleurs (..) Le meuble est vert ; il y a un dressoir plein de curiosités, des tableaux de Delacroix, son portrait par Calametta … Le piano est magnifique et droit, carré, en palissandre »
Square d’Orléans
En 1842, George Sand et Chopin quittent la rue Pigalle pour le square d’Orléans toujours selon le même principe : George s’installe au n° 5 avec Solange dans un appartement au 1er étage. Maurice, élève de Delacroix, dispose d’un atelier. Chopin, lui, occupe deux pièces avec un salon, à l’entresol, en face, au n °9.
« Nous sommes installés depuis deux jours place d’Orléans n°5, rue Saint-Lazare. L’appartement est très beau et très commode. Le maestro s’évertue de son côté et se prépare dans la même place au n° 9 un salon magnifique pour recevoir ses magnifiques comtesses et ses délicieuses marquises »
Eugène Delacroix (1798 -1863) : George Sand, © Musée Ordrupgaard, Copenhague.
Fragment du double portrait de Frédéric Chopin et de George Sand, 1838
« Nous avions quitté les pavillons de la rue Pigalle qui lui déplaisaient pour nous établir au square d’Orléans (…) Nous n’avions qu’une grande cour à traverser pour nous réunir, tantôt chez moi, tantôt chez Chopin quand il était disposé à nous faire de la musique(…) Chopin se réjouissait aussi d’avoir un beau salon isolé où il pouvait aller composer et rêver. Mais il aimait le monde et ne profitait du sanctuaire que pour y donner des leçons. »
Au square d’Orléans, résident à la même époque les musiciens Zimmermann et Alkan, le peintre Dubuffe, la danseuse Taglioni, Louis et Pauline Viardot, la cantatrice.
« Sans sortir de cette grande cour d’Orléans, bien éclairée et bien sablée, nous courons le soir des uns chez lez autres comme de bons cousins de Province. C’est une espèce de phalanstère qui nous divertit. »
Une Triade Romantique
George Sand aurait aimé que Delacroix viennent s’installer square d’Orléans. En 1842, il loge 17 rue Visconti où il a peint (en 1838) l’ébauche du fameux double-portrait de Chopin au piano et de George Sand l’écoutant.
Entre Delacroix et Sand qui se connaissent depuis 1834, les relations sont franches et empreintes d'amitié. Elles sont à la fois plus délicates et plus graves entre le peintre et le compositeur: "J'ai des tête-à-tête à perte de vue avec Chopin que j'aime beaucoup, et qui est un homme de distinction rare: c'est le plus vrai artiste que j'ai rencontré. Il est de ceux, en petit nombre, qu'on peut admirer et estimer."
En octobre 1844, Delacroix installe son atelier et loge rue Notre-Dame-de-Lorette. Il déclare à Sand : « Je suis bien heureux à présent de la pensée que je vais être votre voisin." Les têtes-à-têtes avec Chopin continuent square d'Orléans et, pendant l’été, à Nohant où Delacroix dispose d’un atelier et Chopin de deux Pleyel.
Comment ne pas évoquer avec Georges Sand (Histoire de ma vie), l’union d’une note et d’une couleur ? :
« Chopin n'écoute plus. Il est au piano et il ne s'aperçoit pas qu'on l'écoute. Il improvise comme au hasard. Il s'arrête.
- Eh bien, eh bien, s'écrie Delacroix, ce n'est pas fini !
- Ce n'est pas commencé. Rien ne me vient... rien que des reflets, des ombres, des reliefs qui ne veulent pas se fixer. Je cherche la couleur, je ne trouve même pas le dessin.
- Vous ne trouverez pas l'un sans l'autre, reprend Delacroix, et vous allez les trouver tous les deux.
- Mais si je ne trouve que le clair de lune ?
- Vous aurez trouvé le reflet d'un reflet, répond Maurice
L'idée plaît au divin artiste. Il reprend, sans avoir l'air de recommencer (…) Nos yeux se remplissent peu à peu des teintes douces qui correspondent aux suaves modulations saisies par le sens auditif. Et puis la note bleue résonne et nous voilà dans l'azur de la nuit transparente (…) Nous rêvons d'une nuit d'été
Cette scène décrite par G. Sand semble avoir été peinte par Delacroix. Y -a-t il plus belle façon d’illustrer avec des mots, des couleurs et les notes d’un Pleyel, la fusion et la correspondance des arts chères aux Romantiques ?
Reconstruction hypothétique du double portrait de Frédéric Chopin et de George Sand de Delacroix
Didier CHAGNAS
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Catégorie : - Personnages
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