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La Faculté de Pharmacie

VISITE DU PATRIMOINE HISTORIQUE DE LA FACULTÉ
DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES ET BIOLOGIQUES DE PARIS.

Mercredi 6 avril 2016. Nous sommes trente-sept au rendez-vous, devant l’imposant édifice de la Faculté de Pharmacie de Paris, avenue de l’Observatoire.

Le président de 9ème histoire, Claude Mignot, nous souhaite la bienvenue et rappelle brièvement l’histoire du bâtiment. Devenue trop petite, l’École de Pharmacie de Paris, autrefois installée rue de l’Arbalète dans le vieux quartier Saint-Médard, emménage en 1882 dans ces bâtiments et dans le vaste jardin y attenant, créés à l’emplacement de l’ancienne pépinière de l’enclos des Chartreux.

La IIIe République a la volonté d’encourager les sciences. Le chantier débute en avril 1877 sous la direction de Charles-Jean Laisné1 (1819-1891), architecte diocésain et restaurateur de nombreux monuments. L’architecte construit un bâtiment en brique et en pierre de taille, comportant un grand corps central et deux ailes en retour, sobre et efficace.
Le bâtiment a été plusieurs fois remanié. Un étage supplémentaire abrite la bibliothèque et des laboratoires. Des amphithéâtres ont été aménagés sous la cour d’honneur. Un nouveau bâtiment a été accolé à la façade arrière.
La cour d’honneur est entourée d’un portique à l’italienne. Deux escaliers monumentaux desservent l’étage.

Deux statues en pied, récemment restaurées, représentent Parmentier (pharmacien militaire et défenseur de la pomme de terre) et Vauquelin (premier directeur de l’École Spéciale de Pharmacie en 1803). Sur les façades, des médaillons de marbre blanc rendent hommage à trente-six savants. Ces personnages sont les témoins de la continuité d’une des plus anciennes facultés de France, élément moteur aujourd’hui du Campus Universitaire Paris-Centre.

Située à proximité du Sénat et du jardin du Luxembourg, la Faculté de Pharmacie de Paris détient dans ses bâtiments un riche patrimoine artistique constitué pendant plus de quatre siècles d’existence. Ces richesses (peintures, sculptures, vitraux, mobilier, tapisseries, faïences, musées, jardin…) proviennent pour certaines du passé et de la rue de l’Arbalète, pour d’autres de commandes de l’État (1882-1947) ou plus récemment, de dons de mécènes.

Puis la visite guidée se sépare en deux groupes d’une vingtaine de personnes, dirigés et accompagnés vers quatre lieux emblématiques : La Salle des Actes, le Musée des Faïences, le Jardin botanique et le Musée de Matière médicale. Suffisamment chargé et d’une grande richesse, le programme nous permet cependant d’apercevoir au fil du vestibule et des galeries, les verrières d’Émile Hirsch (1884), les peintures murales et vitraux d’Albert Besnard (1883-1888) ainsi que les œuvres contemporaines de Marcel Gromaire (1938).

LA SALLE DES ACTES
C’est une reproduction en plus vaste de la Grande Salle de l'ancienne école de Pharmacie située, au 17e siècle, rue de l'Arbalète et le symbole de la continuité. À l’origine, c’était dans la Grande Salle que se réunissaient les Maîtres apothicaires et épiciers. Le mobilier, la cheminée et les portraits qui ornaient les murs ont été conservés. Classée monument historique en 1972, la grande cheminée en bois sculpté, doré et peint date du 17e siècle mais le couronnement est un ajout de 1882 pour l‘adapter aux dimensions de la nouvelle salle.

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Simon Vouët - Hélène & Ménélas en Egypte

Le tableau au centre attribué au peintre Simon Vouët date de 1640, dix ans environ après la construction de l’ancien bâtiment de l’école de Pharmacie de la rue de l'Arbalète. La toile représente Hélène et Ménélas en Egypte, une tempête ayant fait détourner leur bateau lors de leur retour de Troie. La reine Polydamna remet à Hélène un baume merveilleux et lui transmet le savoir des simples. (Homère, Odyssée, chant IV).  

Quatre-vingt-dix portraits peints représentant des maîtres apothicaires, des maîtres en pharmacie, des pharmaciens et des gardes sont exposés sur les quatre murs de la Salle. Ces portraits témoignent du rang élevé que tenait la corporation des apothicaires dans la Cité.  À leurs armoiries et à la couleur de leur robe : rouge à l’épaule droite et couleur du tan (tannée) à l’épaule gauche, on reconnaît les échevins de la ville de Paris. Les apothicaires échevins de Paris siégeaient avec le prévôt des marchands à l’Hôtel de Ville.

Ces portraits proviennent du collège de la rue de l’Arbalète. Seul le portrait d’Henri Moissan, prix de Nobel de Chimie en 1906, a été ajouté dans la nouvelle salle, au début du 20e siècle. Arrêtons-nous au portrait de Nicolas Houël (1520-1587), le seul à être peint en pied. Considéré comme le fondateur de la faculté de Pharmacie, le pharmacien philanthrope créa une maison de charité pour orphelins où l’Art de l'apothicairerie était enseigné gratuitement. Le portrait d’Antoine Parmentier (1737-1813) peint en 1812 par Dumont aîné, regroupe toutes les plantes qu’il a étudiées (pas seulement la pomme de terre) dans le bouquet qu’il tient à la main.

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       Portrait de Nicolas Houel                                               Portrait d'Antoine Parmentier

LE MUSÉE DES FAÏENCES PHARMACEUTIQUES
Salle des pots
L’antichambre du cabinet du Doyen a été aménagée en Musée d’Histoire de la Pharmacie. Grâce au pharmacien collectionneur
Charles-Henri Fialon (1846-1931) et à d’autres donateurs, la galerie comprend aujourd’hui plus de 400 pots, chevrettes, piluliers, microscopes et autres objets pharmaceutiques. La large vitrine adossée au mur abrite des faïences italiennes de Savone, des pots espagnols de Catalogne et d’Aragon, une paire de Delft polychromes …

Pour la France, nous notons des pots provenant de l’hôpital Saint-Louis de Rouen (fin du 17e siècle), des vases de Montpellier (manufacture Olivier), un ensemble de pièces de la manufacture de Sceaux (fin du 18e siècle), des faïences de Bordeaux.

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Le musée possède une trentaine de mortiers de bronze de France et de Catalogne (17e et 18e siècles), dans lesquels étaient pilés les ingrédients servant à l’élaboration des remèdes. Des récipients en bois originaires d’Europe centrale, des flacons de verre, des étains d’apothicairerie, et maints objets utilisés dans les anciennes officines complètent ce remarquable ensemble.

 LE JARDIN BOTANIQUE
Autre joyau de la Faculté, le Jardin Botanique a pour vocation de permettre aux étudiants d’apprendre le nom et les effets des diverses plantes médicinales ou toxiques qui y sont conservées. Il est important de pouvoir reconnaître les familles de plantes médicinales.

C’est à Nicolas Houël que revient, en 1576, l’idée de créer, conjointement à un hôpital et à une apothicairerie, un jardin botanique destiné à l’étude et à la culture des simples.

Lors du transfert de l’école à l’avenue de l’Observatoire, le jardin créé en 1884 s’étend sur une superficie de 8 000 m2. L’accroissement des étudiants et la nécessité de construire de nouveaux locaux, réduisent considérablement la superficie du jardin qui passe de 6 300 m2 en 1963 à 3 436 m2 en 1967. Les serres, quant à elles, sont ramenées à 290 m2 (540 m2 à l’origine). Malgré ses mutilations successives, le jardin est un excellent instrument pour l’enseignement de la botanique. Rosiers, papayer, cotonnier, variétés médicinales ou toxiques, plantes et arbres d’exception, le jardin abrite plus de 400 espèces végétales destinées à l’expérimentation scientifique. Elles sont rassemblées par type de bienfait ou de toxicité.

Nous avons pu pénétrer par petit groupe de deux ou trois dans la serre tempérée. La structure métallique de type Eiffel abrite des plantes tropicales et subtropicales, sélectionnées pour leurs floraisons hivernales et pour leur utilité. L’enseignant-chercheur qui nous accompagne, nous conte plusieurs anecdotes sur la vie des plantes et nous invite à en redécouvrir certaines.
La petite maison en briques de deux couleurs avec une tourelle d’angle est destinée au logement des jardiniers.

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LE MUSÉE FRANCOIS-TILLEQUIN
Unique au monde, le musée
François-Tillequin2 est consacré aux plantes à usage médicinal. Ses collections regroupent environ
25 000 échantillons de drogues végétales et animales, ainsi que des objets en rapport avec leur production, leur récolte, leur transport, leur commerce ou leur emploi.

Conservées par séchage, ces « drogues » côtoient d’autres curiosités : objets de contrebande, flèches empoisonnées d’Amazonie, ornements de sorciers... Ici, la science et l’invitation au voyage se mêlent.

Une partie des échantillons remonte aux 17e et 18e siècles, vraisemblablement au Cabinet d’Histoire Naturelle et au Jardin du Roi. La collection s’est enrichie au 19e siècle avec des échantillons provenant des différentes expositions universelles ayant eu lieu à Paris. Le musée a pu s’étoffer également grâce aux expositions coloniales et aux expéditions scientifiques dans les colonies françaises et outre-mer. (Expéditions polaires du Commandant Charcot au début du 20e siècle). Le musée est considéré comme l’un des plus importants du monde. Le seul musée de taille comparable, celui de Pékin, se limite aux drogues chinoises.

Les vitrines datent de la construction du musée. Certaines sont consacrées aux épices (poivres, girofles, piments, vanilles et cannelles), aux plantes à caféine (maté, kolas, guaranas), au cacao, au thé et au café. D’autres vitrines exposent des oléagineux, caoutchouc, oléorésines, baumes, térébenthines, gommes arabiques. Nous remarquons une collection de chaulmoogras (huiles végétales ayant servi dans le traitement de la lèpre). Les drogues animales (castoréum, musc, ambre et civette) et les plantes aromatiques et odorantes (huiles essentielles) ne sont pas oubliées.

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Le meuble en « pagode » (partie centrale et détails décoratifs en plâtre teinté faux bois) est un héritage de l’exposition universelle de 1889. Il renferme plus 500 échantillons d’écorces de quinquinas, d’opium d’origines diverses (Perse, Chine et même Clermont-Ferrand) et d’autres stupéfiants : coca, chanvre indien haschich. Accompagné de flèches et de sarbacanes, le poison de flèches occupe tout un côté de la pagode (poisons cardio toxiques et curares en tubes, pots, flacons et calebasses).

Les collections de l’ensemble constituent un musée remarquable, unique et peu connu.

Remerciements
Un grand merci à nos conférenciers pour leur accueil et leurs explications : Claude Mignot (architecture et façade), Samantha Conti (chargée de la communication à la Faculté de Pharmacie), Olivier Lafont (Salle des Actes), François-Hughes Porée (Jardin botanique), Thomas Gaslonde (musée François-Tillequin) ainsi qu’à Josette Nidrecourt, membre de 9
ème Histoire, ancienne pharmacienne, qui a proposé cette superbe et instructive visite.

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1 En 1869 Charles-Jean Laisné est domicilié 16 rue Laval (actuelle rue Victor-Massé) dans le 9e. Outre le lycée Janson-de-Sailly, la Cour de Cassation et l'École supérieure de Pharmacie, Laisné réalisa un immeuble de rapport au n°24 de la rue La Bruyère, à l’angle de la rue de La Rochefoucauld, dans le 9e. Il succéda à Abadie et Daumet pour la construction de la basilique du Sacré-Coeur.

2 Le professeur François Tillequin, assure jusqu’à sa mort en 2011 à l’âge de 61 ans, la conservation des collections de drogues et objets associés à son laboratoire, connues sous le nom de « Musée de Matière Médicale de la Faculté de Pharmacie de Paris »

Didier CHAGNAS


Date de création : 29/04/2016 • 09:00
Catégorie : - Echos du Terrain
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