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Le Pèlerinage de Médan - octobre 2018



ÉMILE ZOLA
LE « PÈLERINAGE LITTÉRAIRE » DE MÉDAN
RÉUNIT PLUS DE 500 PERSONNES

 

C’est une tradition depuis son décès (dans son appartement du 21 bis rue de Bruxelles, dans le 9e, le 29 septembre 1902) : chaque année, le premier dimanche d’octobre, la Société littéraire des Amis d’Émile Zola (S.L.A.E.Z) réunit ses membres et ses sympathisants dans la maison de l’écrivain à Médan, dans les Yvelines, où des invités de marque prononcent des discours en hommage au grand homme disparu et au mouvement littéraire « naturaliste » qu’il lança en 1877 (le 16 avril, avec Gustave Flaubert et Edmond de Goncourt, au cours d’un dîner à l’entresol de « Chez Trapp » au n°109 de la rue Saint-Lazare, sollicité par cinq jeunes écrivains et Guy de Maupassant). Ces adeptes du réalisme cherchaient à reproduire la réalité avec une objectivité voulant tendre à la perfection et à décrire la nature dans tous ses aspects, même les plus triviaux.


Ce 7 octobre, plus de cinq cents personnes sont venues pour ce « Pèlerinage littéraire » qui fêtait le 116e anniversaire de sa mort et le 120e anniversaire de son article « J’accuse », et elles ont participé au lancement des travaux d’aménagement du Musée Dreyfus qui va être installé dans une annexe importante, un vœu porté depuis longtemps par Pierre Bergé et qui voit enfin le jour.


Dans son article d’octobre 2016, notre ami Didier Chagnas rappelle le « sacre du naturalisme » et l’importance des « soirées de Médan ». C’est en 1878, après le succès de « L’Assommoir », que l’écrivain put acheter cette maison (qu’il ne cessera pas d’agrandir), au bord de la Seine, avec un jardin attenant à la ligne de chemin de fer Paris/Saint-Lazare-Rouen. Sa notoriété était telle que les conducteurs de trains faisaient un arrêt devant la porte du jardin pour laisser descendre ses invités. Zola conviait à Médan ses amis, de nombreux artistes, et les écrivains de son groupe « naturaliste ». En 1880, le « Groupe de Médan » fera paraître un recueil collectif intitulé « Les Soirées de Médan », avec six nouvelles ayant pour thème la guerre de 1870.
 



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Le parc de Médan bordant la ligne de chemin de fer.

 

Rescapée miraculeusement de l’atmosphère asphyxiante de la rue de Bruxelles, sa veuve Alexandrine fit don de la propriété à l’Assistance Publique le 23 février 1905. En 1984, la maison est devenue un musée. Fermée pour une longue restauration, elle a été ré-ouverte en 2016 mais elle n’accueille encore que des visiteurs privés (jusqu’à une centaine). Son ouverture officielle (fin 2019 - début 2020) se fera avec celle du Musée Dreyfus attenant, financé par la Région, la Licra et le Ministère des Armées venus en renfort du mécénat de la Fondation Bergé-Saint-Laurent.  Ce musée sera voué « à toutes les problématiques de la discrimination ».
 


UN ENTÊTEMENT FAROUCHE POUR LA VÉRITÉ
 

Les descendants d’Émile Zola (dont Martine Leblond-Zola, vice-présidente de Maison Zola/Musée Dreyfus, arrière petite-fille de l’écrivain), ont confié à  la S.L.A.E.Z., que préside Bertrand Éveno, la mission de transmettre les exigences de Zola en matière de vérité et la pérennité de ce « Pèlerinage littéraire annuel » au cours duquel des conférenciers donnent une analyse de l’œuvre et évoquent sa mémoire.  

Ces textes sont publiés chaque année par Alain Pagès, directeur des « Cahiers naturalistes » édités par la S.L.A.E.Z. Il a consacré dans le bulletin de 9ème Histoire un long article au « Groupe de Médan » sa création, son histoire de 1877 à 1890 et sa volonté de « représenter le mécanisme des réalités sociales », de créer des sortes de « dossiers sur les problèmes sociaux de l’époque ».

Trois rangs de places avaient été réservés pour les familles Zola, Dreyfus et Bruneau et les membres des quatre associations de soutien à l’œuvre de l’écrivain. Car, « si la ferveur populaire est retombée, Zola compte encore des milliers de « fans » et des centaines de militants ». Ils sont de plus en plus nombreux à venir début octobre célébrer ce « moment de la conscience humaine », comme l’a désigné Anatole France lors de son entrée au Panthéon.


François Labadens, secrétaire général de la S.L.A.E.Z.,  a rendu hommage aux précédents conférenciers récemment disparus qui sont intervenus dans ce Pèlerinage (dont Jean d’Ormesson, Jacques Lanzmann et Simone Veil). Il a évoqué la singularité de Zola et conseillé aux admirateurs du « journaliste engagé » de « rester vigilants » et de relire attentivement et en entier  « J’accuse », sa lettre-plaidoirie toujours d’actualité.



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Zola reste très présent : en décembre 2019, Roman Polanski démarrera le tournage d’un film sur l’affaire Dreyfus avec Jean Dujardin et de nombreux ouvrages sur lui et/ou son œuvre ont été publiés cette année. D’autres viendront en 2019…


C’est à Éléonore Reverzy (professeur à l’Université Paris-Sorbonne nouvelle, qui a consacré un ouvrage à l’œuvre de Zola), que revenait la tâche de rappeler les règles que s’était fixées l’écrivain naturaliste. Le succès des « Rougon-Macquart » est « mondial » et il le doit en grande partie à cette volonté de décrire un réel « panoramique » où tous peuvent se reconnaître. Elle juge son « universalisme » bien différent de celui de Victor Hugo, plus romanesque, « homme d’avant les médias en 1820 », alors que « Zola est dans la littérature-journal en 1881 ».  Il conçut ses livres comme une « machinerie de familiarisation »… Elle rappela que pour bien écrire « Nana », l’auteur avait voulu aller « renifler les odeurs » du Théâtre des Variétés en février 1878, créer une « immersion corporelle » dans laquelle le lecteur pourrait plonger. 
 


Audrey Azoulay (directrice générale de l’Unesco, ancienne ministre de la Culture du précédent gouvernement, qui avait défendu au côté de Pierre Bergé la création du Musée Dreyfus, avec pour objectif de réaliser un outil nécessaire à l’Éducation nationale) a rappelé que l’Unesco lutte entre autres contre le manque d’éducation des femmes, les discriminations et la liberté de la presse avec les mêmes objectifs que Zola : le respect et la recherche de la vérité, « vérité souvent malmenée et déformée aujourd’hui, y compris par des responsables politiques » et la lutte contre la confusion des « vérités diverses ». Zola, qui admirait Claude Bernard et sa recherche de la vérité scientifique, voulait donner à « saisir la vérité comme un peintre » (...) « Le mensonge est une gangrène qui corrompt la société et la menace ». Zola avait « un entêtement farouche pour la vérité ». « J’accuse » a ancré nos enfants dans la République ». Très « zolienne », l’Unesco défend la « solidarité intellectuelle et morale de l’humanité », soutenant « 70 millions d’enseignants qui combattent la trahison de la vérité »,  et elle se veut (comme le proclamait Léon Blum) « la conscience morale et universelle de l’humanité ».


Les « pèlerins », des français aux japonais en passant par les allemands et autres, ont apprécié.
 


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Anick Puyôou
 

              



 

© 9ème Histoire - 2018


Date de création : 08/11/2018 • 13:05
Catégorie : - Echos du Terrain
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