La Cité Bergère
© E. Fouquet © 9e Histoire 2014-2018
LA CITÉ BERGÈRE
Créée en 1827 par la générale de Boulnois, épouse du baron d’empire Louis Jacques François Boulnois, qui en achetant là des terrains en 1824, a réalisé une importante opération immobilière au moment de l’expansion de ce quartier. Cette création urbaine du règne de Charles X, formant un angle droit et dont les entrées donnent rue Bergère et rue du Faubourg-Montmartre, est en effet une des plus originales de la Restauration.
Entrée de la Cité rue du Fg Montmartre et détail du passage vouté Sortie de la Cité, rue Bergère
Le calme y régnant aujourd’hui ne laisse pas imaginer que lors des journées de décembre 1851 du coup d’état de Louis-Napoléon Bonaparte, la Cité Bergère connut des heures noires puisque y furent entreposés là des dizaines de cadavres victimes de la répression…
A l’origine, passage fermé la nuit, disposant de trottoirs (innovation pour l’époque) et de réverbères, la cité Bergère relève du plus élégant style néo-classique. Chaque entrée de la cité s’ouvre par un passage voûté (celui agrémenté de colonnes à chapiteaux doriques donnant sur la rue du Faubourg-Montmartre est ornée de beaux caissons sculptés de rosaces).
Au 1bis, fut implantée en 1887 le premier établissement de la Compagnie Française d’Éclairage Électrique dirigée par Edison, qui allait permettre à Paris de devenir «ville-lumière» lors de l’Exposition Universelle de 1889.
L'hôtel Victoria La Résidence Bergère
Il n’est pas étonnant que dans cette voie paisible, inscrite à l’Inventaire des Monuments Historiques depuis le 9 octobre 1990, la plupart des immeubles soient désormais des hôtels de tourisme (6 !) ayant gardé leur ordonnance de baies cintrées sur entresol et leurs chapiteaux doriques.
Les entrées de ces hôtels sont souvent agrémentées de gracieuses marquises en fonte datant de la Belle Époque, comme celle de l’hôtel Corona au n° 8 ou bien celle du n° 4 à la façade d’époque Restauration.
Hôtel Corona 8, Cité Bergère Hôtel de la Cité Bergère au n° 4
Beaucoup de personnes illustres au XIXe siècle y résidèrent, dont le fabricant de porcelaine Weil (famille maternelle de Marcel Proust) en 1828, et au n°3 Heinrich Heine, le poète romantique allemand, en 1837.
Chopin habita brièvement de juin 1832 à juin 1833, au n°4, une chambre de l’hôtel de France (hôtel de la Cité Bergère aujourd’hui), alors qu’il commençait sa carrière parisienne (peu de temps donc après son premier concert à Paris, dans les salons Pleyel de la rue Cadet, le 25 février 1832).
Albert Londres, le grand journaliste militant (1884 - 1932), a séjourné en arrivant à Paris en 1903 à l'hôtel de l'Univers (aujourd'hui disparu), alors qu'il n'est pas encore le grand reporter qui va courir le monde.
Dans cette Cité, se trouvent aussi les sorties de service du Théâtre des Nouveautés à côté du passage menant à la Cité Rougemont (construite, elle, plus tardivement) et du Palace, vers l’entrée du Faubourg-Montmartre. À l'emplacement du 10, se trouve effectivement en lieu et place, l'entrée de service (ou des artistes) située à l'arrière du théâtre des Nouveautés construit ici en 1921 par Adolphe Thiers avec une salle de 585 places, dont l'entrée principale se trouve au 24 faubourg Poissonnière. Il remplace alors celui du boulevard des Italiens qui avait vu triompher Georges Feydeau entre 1878 et 1911 dans sa grande salle de près de 1 000 places.
Hôtel des Arts et Hôtel d'Espagne 7 & 11, Cité Bergère
On peut aussi signaler qu’est logée désormais au 3bis, dans les étages du même Palace, l'École du Palace, nouvelle école qui propose à la fois une formation théâtrale et à la danse pluridisciplinaire et qui succède à L’Académie Internationale de la Comédie Musicale (AICOM), partie à Nanterre.
Comment ne pas évoquer enfin, au n°18 de la cité, un bistrot à vins… et à chansons, «Au Limonaire», qui perpétuait encore ces toutes dernières années la tradition des goguettes en vogue au début du XIXe siècle, mais qui, contraint de fermer pour nuisances sonores (!), laisse la place désormais à un restaurant finalement sans doute moins convivial que ne laisse envisager son appellation : Friends & family ...
Subsistent cependant encore là des anciens ateliers consacrés à la restauration d'œuvres d'art, seuls témoignages d'une activité artisanale presque révolue aujourd'hui.
Emmanuel FOUQUET
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Dernière modification : 12/09/2018 • 08:42
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