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Oscar Wilde - le 11/10/2016 • 14:12 par HTa

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J.R.S. Stanhope - Love & the Maiden - 1877



OSCAR WILDE
L’IMPERTINENT ABSOLU


 

« Oscar Wilde – L’Impertinent Absolu », est le titre de la nouvelle exposition présentée en cette rentrée, au Petit Palais ; c’est un hommage rendu au célèbre écrivain irlandais qui, après une vie consacrée à l’art, au beau et au superflu, finit ses jours, à l’aube du XXe siècle, dans la capitale française, dans le dénuement le plus complet et la solitude.

Oscar Wilde est né à Dublin en 1854 ; son père était un chirurgien réputé, spécialiste des yeux et des oreilles, sa mère une poétesse qui, sous le nom de Speranza, écrivait des articles en faveur de mouvement nationaliste irlandais.

Après de brillantes études classiques à Trinity College (Dublin), Wilde obtient une bourse de cinq ans pour poursuivre ses études à Magdelen College, Oxford. Là, il a pour professeurs deux spécialistes de l’histoire de l’art et eux-mêmes critiques, Walter Pater et John Ruskin.

Étant sans profession à l’issue de ses études, Oscar Wilde décide de devenir critique d’art, il commente essentiellement des tableaux représentant l’histoire ancienne et la mythologie. Il défend le mouvement pictural naissant l’« Aesthetic Movement » au moment où est inaugurée la première exposition de la Grosvenor Gallery dont les œuvres exposées s’opposent à celles très conservatrices de la Royal Academy. Il défend notamment les peintres préraphaélites : Millais, Burne-Jones, Stanhope…Il est également en rapport avec les artistes du mouvement « Arts and Crafts » et échange des lettres avec William Morris.

A l’époque, il est déjà réputé pour ses tenues excentriques, sa conversation brillante et ses mots d’esprit. Il vit dans une maison de Chelsea, entouré de fleurs de lys et de tournesols ainsi que de porcelaines asiatiques bleues et blanches, selon la mode de l’époque.

En 1882, en partie pour des raisons financières, il entreprend une tournée de conférences aux États-Unis et au Canada, exposant à des auditoires très variés (mormons, Indiens, mineurs…) ses théories sur l’Esthétisme et les arts décoratifs. Pendant ces conférences, il porte des tenues très élaborées (manteau de fourrure ou veste de velours, culottes courtes, bas de soie et escarpins à boucles) comme le montrent les photos « posées » prises par le photographe américain Napoleon Sarony.

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Portrait en pied par Napoleon Sarony 1882

A son arrivée à New York, sûr de lui, il dit au douanier qu’il n’a rien à déclarer si ce n’est son génie. Durant ce séjour,  il proclame  que les Anglais et les Américains ont tout en commun sauf, bien sûr, la langue.
Après un an de conférences, il a suffisamment d’argent pour rentrer en Europe. Il passe trois mois en France et fait la connaissance de Victor Hugo, Mallarmé et Verlaine.

Une fois rentré en Angleterre, il épouse Constance Lloyd dont il a deux fils : Cyril (1885) et Vyvyan (1886).

Pour entretenir le train de vie luxueux auquel il aspire, il reprend, en Angleterre, ses activités de conférencier et devient rédacteur en chef d’un magazine féminin,  le « Woman’s World ». Ses activités littéraires très diverses se multiplient ; il publie des contes (« Le Prince Heureux »), des essais (« Intentions »), des nouvelles, des pièces de théâtre, notamment des comédies de mœurs, pleines d’esprit et de bons mots, dans lesquelles il dénonce l’hypocrisie de la société victorienne.

Ses comédies les plus célèbres sont encore fréquemment jouées aujourd’hui : « L’Éventail de Lady Windermere » (1892), « Un Mari idéal » (1895) et « L’Importance d’être Constant » (1895).

Sa pièce « Salomé », écrite en français, en 1893, et qu’il espère voir interprétée par Sarah Bernhardt à Londres est censurée en Angleterre et ne sera jouée en France qu’en 1896. Elle est illustrée, en noir et blanc, par un jeune artiste, mort à l’âge de 25 ans, Aubrey Beardsley ; ses dessins montrent bien les influences Art Nouveau et japonisante de l’époque.

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Salomé "Apothéose",  Aubrey Beardsley, 1893

En 1891, il publie son unique roman « Le Portrait de Dorian Gray » qui est certainement l’œuvre dans laquelle il a mis le plus de lui-même. D’ailleurs en parlant des trois protagonistes du roman, l’écrivain dit : « Basil Hallward est tel qu’il (Oscar Wilde) croit être, un artiste sentimental qui souffre de vivre sa passion, ses attirances, ses désirs, dans le secret ; Lord Henry est tel que le monde le croit, dandy épicurien, hâbleur, cynique, corrupteur de jeunesse ; Dorian Gray est tel qu’il voudrait être, un idéal esthétique, un objet de désir – dans une autre vie peut-être ».

C’est en 1895, alors qu’Oscar est au sommet de sa gloire, écrivain comblé, réputé, riche, adulé par la haute société, que commence sa descente aux enfers.
Le marquis de Queensberry, père de Sir Alfred Douglas qu’Oscar Wilde avait rencontré en 1891 alors qu’il avait 21 ans et qui était devenu son amant, dépose, au club de Wilde, une carte de visite contenant des termes insultants; celui-ci aurait pu l’ignorer mais peut-être  par esprit de provocation ou sous la pression de Sir Alfred qui détestait son père, il attaque le marquis en diffamation. Il perd ses procès contre le marquis et contre la justice britannique qui l’accuse d’homosexualité et d’immoralité dans ses œuvres.
En mars 1895, il est condamné à deux ans de travaux forcés ; il effectue l’essentiel de sa peine à la prison de Reading, près de Londres. Lors de sa détention, il rédige une longue lettre destinée à son amant et qui sera publiée, après la mort de Wilde, sous le titre de « De Profundis ».

Dès l’annonce de sa condamnation, O. Wilde est proscrit par la société victorienne, ses pièces retirées de la scène et ses biens saisis; à sa libération il se retrouve, par conséquent, sans argent et rejeté de toutes parts, il doit s’exiler et choisit de s’installer en France, à Berneval puis à Paris.
Il prend alors le nom de Sébastien Melmoth (Melmoth étant le héros d’un roman gothique). Ruiné et marqué par deux années d’emprisonnement, il mène alors une vie difficile malgré l’amitié et l’aide apportée par quelques écrivains français. Il meurt dans un obscur hôtel de la rue des Beaux-Arts,
l’hôtel d’Alsace qui récemment est devenu un hôtel cinq étoiles et où des clients fortunés peuvent occuper une chambre dite chambre « Oscar Wilde ».

À sa mort, en 1900, il est enterré à Bagneux, puis, en 1909, ses restes sont transférés au cimetière du Père-Lachaise et placés dans un monument extravagant, représentant un ange-démon volant, œuvre de l’artiste américain Jacob Epstein. Comme le montre une immense photo à la fin de l’exposition, c’est l’un des monuments les plus visités du Père-Lachaise et il est recouvert de baisers au rouge à lèvres de « fans » de l’écrivain, si bien que récemment on a dû restaurer cette sculpture et l’entourer de plaques de verre pour la protéger.

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Monument funéraire d'Oscar Wilde - Sculpteur Jacob Epstein

Cet artiste dont ni le mode de vie ni l’œuvre ne convenaient à ses contemporains, a rédigé, durant son exil en France, un dernier ouvrage « La Ballade de la geôle de Reading », dans lequel il décrit ses conditions de détention et malgré ses difficultés financières personnelles, il s’efforce, à sa sortie de prison, de réunir de l’argent pour l’envoyer à ses  ex-codétenus et soulager leur misère.

Cette belle exposition réunit de nombreux tableaux peints par les contemporains d’Oscar Wilde ( Burne–Jones, Stanhope, Millais, Henner, Blanche…), des caricatures de Max Beerbohm, des encres d’Aubrey Beardsley, les photos de l’écrivain prises par Sarony, des éditions dédicacées, de nombreuses lettres qu’Oscar Wilde a adressées à sa famille ou à ses amis artistes, un audio-visuel de Badinter sur les procès de l’écrivain (en panne, le jour de ma visite) et deux lectures (des extraits du « Portrait de Dorian Gray » et du « De Profundis ») quasi inaudibles.

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Hérodiade de JJ. Henner                                                                   Portrait par Napoleon Sarony 1882

A la toute fin de l’exposition, une vidéo montre le petit-fils d’Oscar Wilde (Merlin Holland) parlant de la vie et des épreuves subies par ce grand-père qu’il n’a jamais connu.

C’est avec regret qu’on quitte cet artiste qui proclamait avoir mis son génie dans sa vie et n’avoir mis que son talent dans son œuvre, conscients que sa vie et son œuvre ont été écourtées par la société hypocrite et intolérante dans laquelle il vivait ; il faut rappeler, qu’en Grande-Bretagne, les dernières lois contre l’homosexualité ont été abrogées en 2000.

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Something to live up to par Thomas Nast, 1882                                 Osacr Wilde et Sir Alfred Douglas, 1893

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Petit Palais
Avenue Winston Churchill
75008 Paris
Ouvert de 10 h à 18 h sauf lundi
jusqu’au 15 Janvier 2017


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Hélène TANNENBAUM