Le Québec de Maurice Sand
UN LIVRE À DÉCOUVRIR
LE QUÉBEC par MAURICE SAND
Le court livre publié par les Éditions Magellan & Cie, nous propose le journal de voyage qu’écrivit Maurice Sand lors de son voyage en Amérique et au Canada, lorsqu’il accompagna le prince Napoléon (cousin de Napoléon III, dit « Plon-plon » !) lors de son voyage diplomatique en 1861 pour tenter une mission de bons offices au début de la guerre de Sécession.
C’est en fait un ensemble de lettres que décida de publier sa mère George Sand dans « La Revue des Deux Mondes » à partir de février 1862, sous le titre « Six mille lieues à toute vapeur ».
Elle avait été en effet séduite par le ton humoristique mais aussi la curiosité que dénotent ses lettres. Elle les présentera d’ailleurs en insistant sur « la spontanéité et la sincérité d’un esprit tout grand ouvert aux objets du dehors ».
On connaissait Maurice Sand plutôt comme marionnettiste talentueux à Nohant où résidait sa mère, que comme écrivain. C’est donc une vraie surprise de découvrir ici la qualité de ces lettres où la finesse de l’analyse se dispute à un réel talent de narrateur.
Le titre choisi par sa mère est finalement tout à fait justifié car c’est en quelques semaines seulement que Maurice Sand et ses compagnons (au rang desquels figurent la princesse Clotilde, la duchesse d’Abrantès ou encore Monsieur de Montholon), parcourent la région des Grands Lacs en remontant le Saint Laurent jusqu’à Québec, en passant par les chutes du Niagara.
Ce voyage pourrait en fait s’assimiler aux circuits organisés proposés par les « tour operators » d’aujourd’hui ! Seuls le car ou l’avion remplaceraient le bateau et le train empruntés à l’époque par l’auteur…
On est d’ailleurs frappé par l’actualité de certains commentaires.
Ainsi lors du passage aux chutes de Niagara, Maurice Sand déplore déjà tout ce qui est construit pour une industrie touristique naissante : « Tous ces hôtels garnis, ces kiosques, ces gradins de bois (…) sont peut-être très utiles, mais cela gâche tout » Il se montre d’ailleurs un écologiste avant l’heure en dénonçant l’action destructrice de l’homme sur la nature : « N’est il pas un coin du monde sidéral où nous pourrions vivre sans détruire ? ».
Il dénonce également avec lucidité les conditions dans lesquels sont traités les autochtones, pour employer le vocabulaire d’aujourd’hui, en rapportant les propos d’une de ses compagnons de voyage : « Pauvres Indiens, pauvres gens, ils sont bien à plaindre ! (…) Nous regardons leur extinction comme un crime et nous sentons qu’ils emportent avec eux au fond des déserts toute la poésie de l’Amérique. » Cela ne l’empêche pas de décrire avec humour la façon dont les Hurons font commerce de leur folklore !
Certes la partie traitant du Québec proprement dit est relativement brève dans ce journal, mais traduit bien la fierté qu’avaient les Français de découvrir cette région du monde qui avait gardé la langue du XVIIIe siècle. Maurice Sand se réjouit également de la manière tenace qu’a la population d’exister face aux Canadiens anglais. Lorsqu’il évoque la ville de Québec, c’est pour la comparer à Angoulème en raison de l’existence, pour les deux cités, d’une ville haute et d’une ville basse !
Une lecture bien intéressante en cette période de vacances, par la qualité documentaire mais aussi littéraire de ces pages !
A signaler aussi dans cette collection « Heureux qui comme … », le livre sur Montréal écrit par Sarah Bernhardt lors de sa tournée triomphale en Amérique du nord.
Editions Magellan & Cie , ©2006.
Emmanuel FOUQUET
Catégorie : - Un Livre à Découvrir
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